G.2 Comment devenir une ville refuge pour les écrivains
1. Qu’est-ce qu’une Ville refuge ?
Dans de nombreux pays du monde, des écrivains ou des artistes sont menacés par le gouvernement ou par des groupes non-étatiques. La seule issue, parfois, est l’exil, temporaire ou définitif.
Soucieuses d’assumer leurs responsabilités dans la lutte pour la liberté d’expression et de création, des villes se sont engagées à accueillir des écrivains persécutés, afin de leur permettre d’échapper à la répression et de poursuivre leur œuvre. C’est dans cet esprit que l’International Cities of Refuge Network (ICORN) ou Réseau international des Villes refuges a été créé, à l’initiative de défenseurs de la liberté d’expression. Il a succédé au Réseau international des villes d’asile, constitué à l’instigation du Parlement international des écrivains en 1993, dans le contexte de la fatwa lancée par l’ayatollah Khomeiny contre l’écrivain indien, Salman Rushdie, auteur du livre Les Versets sataniques.
Le siège d’ICORN est situé à Stavanger (Norvège) où il bénéficie de l’aide de la ville. Il est soutenu, en particulier, par l’Inter- national PEN, la Fondation norvégienne pour la liberté d’expression, le Sigrid Rausing Trust (Londres) et le Centre culturel de Stavanger (Norvège).
Le Réseau compte une trentaine de ville, dont Bruxelles. Certains de ses membres sont de grandes villes culturelles, comme Barcelone, Amsterdam ou Mexico, d’autres, des villes moyennes, comme la cité universitaire d’Aarhus (Danemark) ou la cité historique de Chiusi (Toscane, Italie).
2. Quels sont les objectifs des Villes refuges ?
La raison d’être de ce programme est d’assurer la protection d’écrivains menacés en leur fournissant un « abri », mais le Réseau des Villes refuges considère son projet comme un élément d’une lutte plus large pour la défense des valeurs démocratiques, la promotion de la liberté d’expression et la solidarité internationale.
Pour atteindre ces objectifs, ICORN vise, en particulier, à établir des relations entre les villes partenaires et entre les écrivains accueillis dans ces Villes refuges. Elle soutient également la participation des écrivains à des manifestations littéraires nationales et internationales.
3. Quelles sont les conditions d’octroi du titre de ville refuge ?
Le titre de « Ville refuge » est octroyé par le centre d’administration d’ICORN. Celui-ci homologue les villes partenaires et coordonne les demandes de refuge soumises par des écrivains en danger. Pour être ville refuge, une commune doit :
- s’engager à accueillir un écrivain pendant deux ans ;
- lui fournir ainsi qu’à sa famille un logement meublé ;
- l’aider à obtenir un statut légal (visa, permis de résidence) ;
- lui octroyer une bourse qui lui sera versée par mensualités, le montant de cette bourse étant décidé en commun avec le centre de Stavanger ;
- couvrir les frais de voyage de l’écrivain et de sa famille de leur lieu de résidence à la ville refuge ;
- désigner une personne chargée d’accompagner l’écrivain et de faciliter son intégration au sein de la ville ;
- s’assurer que l’écrivain jouisse de bonnes conditions de vie et de travail ;
- prendre en charge son assurance soins de santé durant la durée du séjour ;
- permettre à l’écrivain de bénéficier des services publics municipaux (transport public, bibliothèque, école, etc.) ; • faciliter les rencontres entre l’écrivain et les organisations littéraires de la ville ;
- fournir l’accès aux services permettant à l’écrivain d’apprendre la langue du pays hôte ;
- payer une cotisation annuelle au Centre d’administration d’ICORN.
4. Bruxelles, ville refuge
La ville de Bruxelles est devenue Ville refuge à l’initiative de l’association Passa Porta. Cette dernière est appuyée par la ville de Bruxelles, la Région de Bruxelles-Capitale, la Communauté française et les institutions culturelles et communautaires flamandes.
L’écrivain et journaliste serbe Dejan Anastasijevic est le premier écrivain invité à Bruxelles dans ce cadre. En 1998, ses pièces traitant des actes de violences commis à l’encontre des Albanais du Kosovo lui avaient valu l’inimitié du régime de Milosevic. Il fut aussi le premier journaliste serbe à témoigner au Tribunal pénal international sur l’ex-Yougoslavie (La Haye) contre Milosevic. Actuellement, son travail journalistique porte principalement sur le crime organisé et l’insécurité en Serbie.
Actualisation
En 2017, le réseau compte une soixantaine de villes. Bruxelles a également accueilli le romancier russe Boris Korkmazov, le journaliste marocain Ali Amar et l’auteur-compositeur interprète iranien Arash Chakeri.