1.1 Avant-Propos

De Les droits humains au coeur de la cité
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La commune est l’institution la plus proche des citoyens, mais cette proximité ne débouche pas forcément sur une citoyenneté active, et encore moins sur une politique de respect et de promotion des droits humains. Et pourtant, aux quatre coins du globe, des municipalistes et des associations citoyennes se sont engagés pour mettre les droits humains au cœur de la cité. À l’initiative d’Amnesty International, Anne-Marie Impe et Jean-Paul Marthoz ont collecté des dizaines de “ bonnes pratiques ”, originales ou innovantes, d’ici ou d’ailleurs, qui pourraient inspirer les responsables politiques – mais aussi les associations et les citoyens – pour améliorer le quotidien de toutes et de tous, et surtout des plus faibles. En recourant à l’éclairage du projet de la Charte agenda mondiale des droits de l’homme dans la cité, les auteurs montrent comment les municipalités peuvent jouer un rôle de premier plan dans l’élaboration et la mise en œuvre de politiques respectueuses des droits humains. Vous trouverez l’intégralité des fiches de cette publication sur le site web.

CHANGER LA VIE DANS MA COMMUNE ? C’EST POSSIBLE !

Chercher, partout dans le monde, des exemples de bonnes pratiques en matière d’application des droits de l’Homme dans les communes : lorsqu’Amnesty nous a confié cette enquête, nous étions enthousiastes. Enfin une étude qui n’était pas d’avance condamnée à finir sa vie, recouverte d’un linceul de poussière, sur une étagère ! Elle pourrait, nous semblait-il, servir concrètement à quelque chose. « Avoir été peut-être utile, C’est un rêve modeste et fou… », écrivait Aragon, chanté par Jean Ferrat.

UNE CHARTE SOUTENUE PAR UN VASTE MOUVEMENT CITOYEN

Pour appuyer sa campagne, Amnesty a choisi, comme texte de référence, la Charte Agenda mondiale des droits de l’Homme dans la Cité. Lancée dans le cadre du CGLU (Cités et gouvernements locaux unis), le réseau mondial des villes, gouvernements locaux et régionaux (2), son objectif est de promouvoir l’application effective des droits de l’Homme à l’échelon local, dans le plus grand nombre de communes et de municipalités du monde. Cette Charte a le mérite d’être portée par un vaste mouvement international associatif et citoyen, même si elle affiche quelques lacunes. Ainsi, le droit à l’emploi, pourtant capital, n’y figure pas. Comme le souligne toutefois très justement Philippe Hensmans, « N’oublions pas que le texte de cette charte a été produit pour des villes très différentes. On n’est pas face à un pacte international contraignant : rien n’empêche une commune de modifier les accents de la charte, voire d’aller plus loin. Ce qui compte, c’est la volonté d’améliorer les droits des citoyens. »

POUR UN PARTAGE DES BONNES PRATIQUES

Notre travail a consisté à repérer, pour chacun des XII droits de cette Charte, s’il existait, quelque part dans le monde, une commune qui ait tenté de mettre en œuvre une action concrète pour en faire progresser l’application. Derrière le foisonnement prolifique des grandes déclarations d’intention et parmi l’abondante littérature produite par les très nombreuses organisations travaillant avec les pouvoirs locaux, nous avons tenté de dénicher quelles étaient les initiatives intéressantes réellement mises en œuvre.

Parmi celles-ci, les plus connues côtoient les plus originales ou les plus innovantes. On citera pêle-mêle le budget participatif de Porto Alegre ; les marches exploratoires des femmes, pour lutter contre l’insécurité (Canada) ; les Community land trust, qui favorisent l’accès au logement pour les plus démunis (États-Unis et Bruxelles) ; l’Article 27, pour rendre la culture accessible à tous, en Fédération Wallonie-Bruxelles de Belgique ; ou le lancement d’une cantine scolaire bio à Barjac (France), qui a transformé la vie du village et suscité une vaste réflexion sur l’empoisonnement des campagnes par les pesticides. Sans compter l’accompagnement des Morts de la rue, pour que personne ne soit enterré dans la solitude ; les Handicontacts, pour mieux intégrer les personnes handicapées ; ou les villes refuges, qui accueillent des écrivains et artistes menacés. Cette charte étant mondiale, nous avons souvent présenté des bonnes pratiques se déroulant au-delà des frontières, pour ouvrir tout grand l’horizon mais aussi pour éviter d’opérer des choix arbitraires : quelle cantine bio mettre en exergue, en effet, celle d’Ottignies, de Gembloux ou de Sombreffe ? Lorsque nous citons une expérience en Belgique, elle s’est souvent imposée d’elle-même : Ottignies est, par exemple, la première commune à avoir institué un échevinat des droits humains. Pour les autres, les choix opérés ne signifient nullement que les expériences décrites soient les seules, ni les meilleures dans leur catégorie. Non. Il ne s’agit ici que d’un tout premier défrichage. Une simple mise en bouche. Une voie tracée pour susciter le désir de poursuivre.

Il existe en effet mille et une très bonnes pratiques dont nous n’avons pas parlé. C’est d’ailleurs l’aspect à la fois frustrant et incroyablement riche de ce travail : nous avons recensé de très nombreux responsables communaux et militants associatifs que nous aurions souhaité contacter ou rencontrer pour vous présenter leurs projets. Plus nous progressions dans la recherche, plus nous prenions conscience à la fois de l’ampleur du champ d’investigation et de l’extraordinaire travail réalisé par nombre d’associations œuvrant, en collaboration avec les pouvoirs locaux, dans les domaines traités par la Charte Agenda, même si toutes n’abordaient pas ces thématiques sous l’angle spécifiquement “ Droits de l’Homme ”. Notre tour du monde des bonnes pratiques municipales n’est donc qu’à peine esquissé.

L’objectif principal de ce travail était de vous faire découvrir quelques expériences intéressantes, voire franchement enthousiasmantes, avec l’espoir qu’elles fassent tache d’huile, que des élus d’autres communes s’en inspirent pour mettre en œuvre sur leur territoire des initiatives similaires. Ou que des militants associatifs et de simples citoyens s’en saisissent pour interpeller leurs responsables communaux. Il s’agissait en quelque sorte de tenter de transmettre à chacun le désir de s’engager pour les droits humains et de faire de sa commune un lieu où il fasse bon vivre pour tous : personnes âgées ou en situation de handicap, femmes seules avec enfants, étrangers, Gens du Voyage et tous les autres citoyens. Nous ne nous sommes pas rendus dans toutes les municipalités citées dans ce guide, pour vérifier le bon fonctionnement effectif et le dynamisme de chacune des initiatives présentées. Ce n’était pas l’objet de ce travail. Nous ne voulions en aucune manière distribuer les bons et les mauvais points. Nous avons fait confiance aux informations fournies par les communes, associations et organisations internationales par téléphone ou sur leur site Internet.

COMMENT S’ARTICULE CE TRAVAIL ?

Dans la brochure et sur le site actualisé en novembre 2017, vous trouverez douze chapitres, correspondant aux douze droits de la Charte Agenda. Chacun présente, d’une part, l’énoncé du droit et le plan d’action proposés par les auteurs de la Charte Agenda ; et, d’autre part, les exemples (ou fiches) de bonnes pratiques que nous avons rédigés. Les fiches sont très différentes et de trois types. Les premières décrivent des initiatives concrètes et constituent en quelque sorte des boîtes à outils, expliquant comment réaliser telle ou telle action. À la fin de chacune figurent les coordonnées d’une personne de contact ou un site Internet de référence, afin de favoriser les échanges.

Les deuxièmes sont plus institutionnelles et présentent des conseils, commissions et chartes, parce que sans institutions qui assurent le suivi des actions, il n’y a pas de mise en œuvre possible d’une réelle politique des droits humains.

Quant aux troisièmes, elles souhaitent susciter une réflexion sur des problématiques complexes. Entre le droit des citoyens à la liberté et à la sécurité, par exemple, où placer le curseur ? Comment éviter l’instrumentalisation des budgets participatifs par les plus nantis et les plus éduqués ? Ou encore, comment arbitrer entre le droit de manifester et le maintien de l’ordre public ?

Ces fiches ont cependant toutes le même objectif : elles se voudraient modeste contribution à un vaste mouvement en faveur d’une meilleure prise en compte des droits de l’homme par les pouvoirs locaux. Veiller à devenir une municipalité inclusive, attentive à l’insertion de chacun, quelle que soit sa différence ; créer un climat respectueux des libertés fondamentales et des droits de chaque citoyen ; œuvrer pour un meilleur accès au travail, au logement, à l’éducation et à la culture pour tous : n’est-ce pas cela, changer la vie ?

Anne-Marie Impe

ACTUALISATION

Rédigé en 2010, ce guide a été entièrement actualisé en novembre 2017. Tous les liens Internet ont été vérifiés, adaptés, changés. De nouvelles références (rapports, articles, vidéos) on été ajoutées.

Nous avons par ailleurs été agréablement surpris de découvrir que la plupart des actions présentées en 2010 existaient encore, et que, de surcroît, plusieurs d’entre elles s’étaient considérablement développées. Moins d’une demi douzaine d’expériences ont disparu. Lorsqu’il y avait matière à le faire, nous avons aussi donné des informations récentes, sous le texte, en une rubrique nommée « actualisation ». Enfin, plusieurs fiches nouvelles sont apparues sur le site, rédigées cette fois par des associations citoyennes et des collectivités locales.

Ce guide est donc devenu le vôtre au fil des ans ; nous espérons que cette co-création se poursuivra. Si vous souhaitez partager une expérience originale ou novatrice, menée par votre commune ou par une autre municipalité, vous pouvez remplir la fiche ici: http://www.lesdroitshumainsaucoeurdelacite.org